Pause café à Connantray, où je fais la connaissance de Laurence, Monica, et Sophie.
Sophie, 40 ans de vie au bord de la Nationale 4.
Sophie, 40 ans de vie au bord de la Nationale 4.
Non elle est pas dérangeante cette route, c'est juste que c'est poussiéreux, c'est sale, on peut jamais avoir
les carreaux propres... mais non, faut pas la dévier parce que sinon Monica va fermer ! Mais pour ceux qui habitent
vraiment au bord c'est contraignant quoi. On peut pas dormir la fenêtre ouverte la semaine, on peut pas regarder
la télé avec les fenêtres ouvertes la journée...
Après, c'est tous les routiers qui s'arrêtent n'importe où alors que c'est des stationnements interdits, qui nous laissent leurs poubelles, voire pire que leurs poubelles... Là on a trouvé une couche de gamin... Je sais pas, la France c'est pas une déchetterie quoi. Au bout d'un moment faudrait peut-être que les Français pensent un peu aux autres et pas qu'à eux. Ils passent dans un village où c'est marqué 50, au moins qu'ils respectent ! Si nous on a un gamin qui traverse pour aller à l'école, il est pas susceptible de tourner la tête à gauche pour regarder si quelqu'un arrive. C'est arrivé à Christophe, il a tourné la tête à gauche pour regarder s'il y avait une voiture ou un camion, il a tourné la tête à droite, il s'est lancé sans réf... j'ai juste eu le temps de le rattraper.
Après, c'est tous les routiers qui s'arrêtent n'importe où alors que c'est des stationnements interdits, qui nous laissent leurs poubelles, voire pire que leurs poubelles... Là on a trouvé une couche de gamin... Je sais pas, la France c'est pas une déchetterie quoi. Au bout d'un moment faudrait peut-être que les Français pensent un peu aux autres et pas qu'à eux. Ils passent dans un village où c'est marqué 50, au moins qu'ils respectent ! Si nous on a un gamin qui traverse pour aller à l'école, il est pas susceptible de tourner la tête à gauche pour regarder si quelqu'un arrive. C'est arrivé à Christophe, il a tourné la tête à gauche pour regarder s'il y avait une voiture ou un camion, il a tourné la tête à droite, il s'est lancé sans réf... j'ai juste eu le temps de le rattraper.

Ici il y a surtout des agriculteurs ? Il y a des magasins ?
Pas de magasin. Le dernier magasin qu'il y avait c'est nous. Donc on l'a fermé en ... je crois que ça doit être en 78 ou en 79.
On a dû le garder deux, trois ans, c'était pas... Ca tournait pas assez. On n'a plus de boulanger qui passe. Sauf ceui de Vitry qui
veut bien nous déposer notre pain en passant pour sa livraison. Alors qu'on est à 5 kilomètres de Fère Champenoise. Mais y'a pas un
boulanger qui veut nous livrer. On a aucun... on n'a pas de boucher, on n'a pas de poissonnier, on n'a rien qui passe. Non on est vraiment isolés ici.
Comme on dit c'est le trou du cul du monde. Il y a pas pire je crois ! Parce que même à Angluzelles qui est plus petit, on a l e poissonnier, le boucher, le boulanger, là ici on a vraiment rien.
Il va y avoir Intermarché à la Fère-Champenoise. En espérant qu'ils s'alignent pas sur les prix à Carrefour.
Comme on dit c'est le trou du cul du monde. Il y a pas pire je crois ! Parce que même à Angluzelles qui est plus petit, on a l e poissonnier, le boucher, le boulanger, là ici on a vraiment rien.
Il va y avoir Intermarché à la Fère-Champenoise. En espérant qu'ils s'alignent pas sur les prix à Carrefour.
Et vous venez souvent ici, dans ce café ?
On vient minimum une fois ou deux fois par semaine. Ca fait des années qu'on vient puisqu'avec la propriétaire d'avant
on venait aussi, et puis c'est un lieu de réunion. On connaît des chauffeurs donc c'est rendez vous ici, ma sœur habite pas loin,
c'est convivial et ça permet de se retrouver, c'est un endroit où on se retrouve. De toute façon il y a que ça donc on a pas le choix.
On va pas louer la mairie hahaha faire un barbecue tous les jours !
Non, c'est là qu'on se retrouve quoi. Si on vient pas là on se voit jamais. Parce que... les amis qui sont chauffeurs ils sont d'Alsace, ils sont des Vosges donc c'est le point de rendez-vous.
Mon mari est routier, ma sœur est routier donc ça aide un peu aussi ! C'est sûr que si on est pas routier... je pense pas que ma belle fille Montaine serait entrée dans un routier toute seule !
Non, c'est là qu'on se retrouve quoi. Si on vient pas là on se voit jamais. Parce que... les amis qui sont chauffeurs ils sont d'Alsace, ils sont des Vosges donc c'est le point de rendez-vous.
Mon mari est routier, ma sœur est routier donc ça aide un peu aussi ! C'est sûr que si on est pas routier... je pense pas que ma belle fille Montaine serait entrée dans un routier toute seule !
Il y a souvent des routiers qui s'arrêtent ici ?
Ben il y en a quelques uns quand même... je sais pas, je sais pas quelle époque on vit. Les gens mangent dans leur camion...
Ben de toute façon y'a plus d'argent. Dans le porte monnaie des Français y'a plus d'argent. Donc s'arrêter ici ça a un coût quand
même hein. Parce que si peu qu'on tombe en bande c'est une soirée à 50 euros. Donc faut avoir le budget pour le faire
une ou deux fois par semaine. Nous on peut parce que c'est un loisir, c'est le plaisir de se retrouver, mais nos amis chauffeurs ils
vont pas faire ça non plus tous les jours, ça fait un budget ils ont une famille qui attendent chez eux quand même.
On s'envoie des messages et hop " je serai à Connantray ce soir "...

Il y a plus que ça qu'on a le temps de faire quoi. Parce que je pense que le porte-monnaie des français s'est vidé et que tout le commerce
s'en ressent quoi. Pas que les routiers, il y a aussi tous les petits magasins aux alentours. On fait plus nos courses comme avant non plus,
enfin il y a plein de choses qui ont changé... et du coup on devient plus grognons ! Puisqu'on est plus dans les soucis.
Là franchement la France je la sens pas bien partir quoi. C'est... les jeunes sont pas bien dans leur peau, ils font que des bêtises, c'est...
nous en tant qu'adultes on est paumés aussi parce que avant avec un salaire on y arrivait, maintenant avec deux on n'y arrive plus, je sais pas
quel avenir on va leur laisser mais c'est pas joli joli. Parce que payer, payer c'est bien mais si on fait que bosser pour payer, au bout
d'un moment on en a ras le bol. Tu peux plus partir en vacances, tu peux plus rien faire. Donc tu te dis que tu travailles 10 mois par an,
pour faire quoi ? Pas grand-chose finalement. Tu bosses, tu te lèves, tu manges, tu te recouches, tu payes tes factures et... oui c'est ça que
je suis en train de dire, je vois pas ça beau quoi.
De toute façon quel avenir pour nos jeunes ? Macron a dit qu'il enverrait 20 000 jeunes à l'étranger pour ouvrir les frontières. Je suis désolée je préfère laisser nos jeunes en France, et les autres restent chez eux, c'est peut-être un peu dégueulasse, je suis pas raciste, mais là il y a des limites de payer pour les autres. Parce qu'on a l'impression qu'on paye, qu'on paye, qu'on paye pour les autres et que nous on est en train de couler mais alors... On s'en sort plus quoi.
Moi je me cache pas je suis pas raciste, à l'origine je suis pas française. Mon grand père est Polonais donc... mais y'a un ras le bol. Ouvrir les frontières c'est bien mais pour donner quoi aux gens ? Il y a rien. On a déjà pas de boulot, nous. Ouvrir les frontières c'est bien joli si on avait du travail, si on avait des logements. Maintenant on va privilégier les étrangers pour des logements, et les jeunes ils ont du mal à se trouver un appart ! C'est quoi le délire ?
De toute façon quel avenir pour nos jeunes ? Macron a dit qu'il enverrait 20 000 jeunes à l'étranger pour ouvrir les frontières. Je suis désolée je préfère laisser nos jeunes en France, et les autres restent chez eux, c'est peut-être un peu dégueulasse, je suis pas raciste, mais là il y a des limites de payer pour les autres. Parce qu'on a l'impression qu'on paye, qu'on paye, qu'on paye pour les autres et que nous on est en train de couler mais alors... On s'en sort plus quoi.
Moi je me cache pas je suis pas raciste, à l'origine je suis pas française. Mon grand père est Polonais donc... mais y'a un ras le bol. Ouvrir les frontières c'est bien mais pour donner quoi aux gens ? Il y a rien. On a déjà pas de boulot, nous. Ouvrir les frontières c'est bien joli si on avait du travail, si on avait des logements. Maintenant on va privilégier les étrangers pour des logements, et les jeunes ils ont du mal à se trouver un appart ! C'est quoi le délire ?

Monica, la gérante, a quitté la Roumanie pour la France en 1990. Elle envisage de repartir en Europe de l'Est.
Avec ce qu'ils nous ont pondu en plus quoi ! Assommés de charges, on fait pour le plaisir des gens parce qu'on est humains quand même. On fait à manger,
on fait de tout, on met tout, le coeur, tout. Et bon, les charges... ils nous donnent pas d'espoir, ils nous donnent que du... à pleurer quoi. C'est pour
ça qu'à la fin on baisse les bras. Il y a des gens qui disent que les pays de l'Est c'est pas bien mais je préfère vivre là-bas, pas cher, où je sais
ce que je mange parce que les gens ils ont pas assez de sous pour acheter les produits... c'est tout naturel ! Que du bio ! Alors qu'est-ce que tu veux de plus ? A mon âge,
je veux plus faire fortune, je veux plus m'enrichir, je veux vivre convenablement et sans stress. C'est ça mon but.
Moi je suis arrivée en 90 en France et c'était vraiment... on a travaillé, on a bien gagné, on avait les vacances, on pouvait mettre de côté. Je me suis bien intégrée, mon mari c'était un grand entraîneur de natation et vraiment on était les bienvenus, on a apporté beaucoup de médailles en France. Je travaillais comme interprète, mes enfants ils sont bien, ils ont une bonne situation aussi. Mais là ça devient pénible. C'était un pays que j'adorais depuis mon enfance. Là c'est un peu dur.
Qu'est ce qui est dur ? Ben c'est tout ce qu'on paye. On n'arrive pas au bout ! Haha ! Sinon c'est une merveille, c'est vrai parce que on est des gens bien, il y a des gens qui sont bien mais... c'est pas le côté humain mais le côté taxe et machin. On est morts, on est morts ! On peut plus. Alors pour tomber malade, le stress et tout ça... On préfère vivre pas riches mais bien. C'est ça mon but.
Quand moi je suis arrivée en 1990 c'était super, on travaillait, on gagnait, on avait tout ! J'ai commencé femme de ménage, j'ai mon diplôme d'aide soignante j'ai mon diplôme de cuisinière. Mais pour le début, le temps de faire valoir mes diplômes je travaillais dans le ménage, je faisais tout. Et j'ai bien gagné ma vie. Et c'était bien. J'arrivais à donner à mes enfants de bonnes études et maintenant... heureusement qu'ils ont du travail mais sinon, je crains pour les petits. Les petits enfants et ma retraite aussi. Que j'ai payé, j'ai travaillé avec 4 patrons à la fois. Je sais pas si les points ils vont se mettre quatre fois, je crois pas hein ! Parce que les dernières années ça compte les 10 ans là. RSI et compagnie... c'est pour ça que je laisse tomber. Franchement. J'ai plus envie. Ca m'a dégoutée. Je me bats pour rien. Dans la restauration, on donne tout ce qu'on a, on fait tout pour être aux normes, tous les jours, tous les jours, avec les moyens du bord parce qu'on gagne pas beaucoup. Mais au lieu de t'aider, l'État, au lieu de te dire "voilà vous êtes exonéré de ça parce que vous avez fait ça..."
Moi je suis arrivée en 90 en France et c'était vraiment... on a travaillé, on a bien gagné, on avait les vacances, on pouvait mettre de côté. Je me suis bien intégrée, mon mari c'était un grand entraîneur de natation et vraiment on était les bienvenus, on a apporté beaucoup de médailles en France. Je travaillais comme interprète, mes enfants ils sont bien, ils ont une bonne situation aussi. Mais là ça devient pénible. C'était un pays que j'adorais depuis mon enfance. Là c'est un peu dur.
Qu'est ce qui est dur ? Ben c'est tout ce qu'on paye. On n'arrive pas au bout ! Haha ! Sinon c'est une merveille, c'est vrai parce que on est des gens bien, il y a des gens qui sont bien mais... c'est pas le côté humain mais le côté taxe et machin. On est morts, on est morts ! On peut plus. Alors pour tomber malade, le stress et tout ça... On préfère vivre pas riches mais bien. C'est ça mon but.
Quand moi je suis arrivée en 1990 c'était super, on travaillait, on gagnait, on avait tout ! J'ai commencé femme de ménage, j'ai mon diplôme d'aide soignante j'ai mon diplôme de cuisinière. Mais pour le début, le temps de faire valoir mes diplômes je travaillais dans le ménage, je faisais tout. Et j'ai bien gagné ma vie. Et c'était bien. J'arrivais à donner à mes enfants de bonnes études et maintenant... heureusement qu'ils ont du travail mais sinon, je crains pour les petits. Les petits enfants et ma retraite aussi. Que j'ai payé, j'ai travaillé avec 4 patrons à la fois. Je sais pas si les points ils vont se mettre quatre fois, je crois pas hein ! Parce que les dernières années ça compte les 10 ans là. RSI et compagnie... c'est pour ça que je laisse tomber. Franchement. J'ai plus envie. Ca m'a dégoutée. Je me bats pour rien. Dans la restauration, on donne tout ce qu'on a, on fait tout pour être aux normes, tous les jours, tous les jours, avec les moyens du bord parce qu'on gagne pas beaucoup. Mais au lieu de t'aider, l'État, au lieu de te dire "voilà vous êtes exonéré de ça parce que vous avez fait ça..."
On fait le compte des routiers fermés ou brûlés au bord de cette portion de N4. A part le Kebab pyramide - le quatre pentes -, le relais de
Connantray est la seule activité à avoir survécu.

Finalement, je pose la question.
Réponse de Sophie :
Réponse de Sophie :
Là aux élections c'était l'extrême droite. Dans tous les villages. Partout autour.
Je dis pas qu'ils feraient peut etre mieux, mais de toute façon on pourra pas avoir pire.
Faut essayer pour savoir.
Je dis pas qu'ils feraient peut etre mieux, mais de toute façon on pourra pas avoir pire.
Faut essayer pour savoir.
